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McFly (DaviD) – FRAGILE ET AUTHENTIQUE

FRAGILE ET AUTHENTIQUE

Il y a une dizaine d’années, McFly avait dévoilé sa facette guitaristique en publiant sur YouTube son interprétation d’« Innocence Faded » de Dream Theater. Amoureux de l’instrument, ce fan de rock et de metal s’échappe de YouTube pour nous présenter son premier EP solo Le But du jeu, et attaque le live armé d’une belle guitare signature réalisée par Tom Marceau.

Passer d’un phénomène YouTube de grande envergure à une carrière d’artiste et de performer ? C’est le nouveau défi que s’est lancé David Coscas, aka McFly, qui avec son acolyte Carlito a réussi à évangéliser une communauté de 7 millions de followers, à grand renfort de sketches, de concepts hilarants (« On appelle les gens au hasard au téléphone » ou « Mario Carte Bleue ») et de collabs avec des célébrités. McFly et Carlito avaient déjà tenté l’aventure du rock en 2021 avec Notre Meilleur Album, une expérience en demi-teinte, qui avait fonctionné au niveau du live, mais beaucoup moins au niveau des ventes d’albums et des streams. Cette fois, McFly se lance seul et sous son propre prénom, DaviD, et nous livre un chapelet de six titres plutôt introspectifs, à base de riffs tranchants et bien carénés, de mélodies et de textes intimes laissant s’exprimer fragilité et sensibilité à fleur de peau. Cette nouvelle aventure va se poursuivre avec une tournée de chauffe dans les clubs (les dates seront annoncées via le canal Instagram de David). Guitare Xtreme a rencontré « the artist » !

TA PASSION POUR LA MUSIQUE ET LA GUITARE EST CONNUE. AS-TU HÉSITÉ À UN MOMENT DONNÉ À EN FAIRE TA VIE ?

Mais carrément, et pour être franc, j’ai été à deux doigts de le faire. Il se trouve que j’ai rencontré ce grand fou de Carlito, ce qui a un peu contrecarré mes plans (rires). Mais tu as raison, j’ai toujours été musicien. Mes parents m’ont collé au violon et au solfège dès l’âge de 5 ans, même si je n’ai jamais eu de vrai coup de coeur pour cet instrument. La rencontre avec la guitare s’est opérée via mon père, qui était batteur dans un groupe amateur. J’écoutais ses albums rock, les Eric Clapton et compagnie. Un jour, dans le local où ils répétaient, je suis tombé nez à nez avec la Strat de son pote guitariste Jeanbé. Ce dernier m’a montré la position du Mi mineur. Il a enclenché la disto et j’ai plaqué mon premier accord. Là, il s’est passé un truc de dingue. Le son de ce simple accord était si vivant et beau. Tout de suite, ça racontait quelque chose. Grâce à l’aisance digitale acquise avec le violon, j’ai pu me débrouiller, et sans tout défoncer, en quelques semaines, j’ai pu jouer des trucs. Au collège, j’ai rencontré des gars qui voulaient former un groupe de rock. Soudain, j’ai eu l’impression de commencer à exister. C’est simple, je trimballais toujours ma gratte avec moi. J’étais possédé.

En studio avec La Déferlante, une belle Offset inspirée de la Jazzmaster.

AVEC QUEL GENRE DE MUSIQUE AS-TU FAIT TES ARMES ?

J’ai très vite laissé le rock à papa pour embrayer sur le metal, des trucs symphoniques et prog comme Dream Theater, Symphony X ou même Steve Vai et Joe Satriani. Le fait d’écouter une musique si exigeante couplé à mes facilités m’a permis de progresser assez vite. Mon premier objectif à ce moment-là, c’était d’être aussi rapide et technique que possible (rires).

CE N’EST PAS ULTRA-FLAGRANT EN ÉCOUTANT TON EP…

Non, tu as raison, mais il y a quand même des réminiscences. Pour ce projet, en composant ces chansons, je voulais avant tout découvrir qui j’étais et trouver mon propre son, parce que pendant l’essentiel de mon parcours musical, j’avais surtout passé du temps à reproduire ce que j’adorais, même dans mes compos. J’ai eu envie de tout poser sur la table et comprendre pourquoi je faisais de la musique, et ce sans rien m’interdire, parce que j’aime autant le prog que le death, la pop ou même Zazie. Je voulais aussi m’affranchir du côté démonstratif et mettre ma guitare au service de chansons qui me plaisent et qui me touchent. Il m’a fallu vaincre ce que j’appelle le « complexe du musicien ».

« Je préfère que les énergies négatives sortent de moi plutôt que les laisser pourrir à l’intérieur de moi, et la musique est un parfait exutoire pour ça. »

QUE VEUX-TU DIRE PAR LÀ ?

Eh bien, pour moi, être légitime en tant que musicien, ça voulait forcément dire rejeter la simplicité et toujours aller vers des trucs chiadés et complexes. C’est Bigflo qui m’a un jour fait comprendre qu’une chanson n’a pas forcément besoin d’être ultra-compliquée pour être belle et honnête. Je me suis donc débarrassé de tout ça. C’est aussi par honnêteté que j’ai choisi de chanter en français. Je maîtrise correctement l’anglais, mais pas suffisamment bien pour exprimer précisément ce que je ressens au fond de moi. Et puis, quand j’étais ado, même si je kiffais les trucs ricains, j’ai été bercé par les groupes de la Team Nowhere, avec Pleymo, Enhancer, Aqme, Wünjo et tous ces groupes qui chantaient en français. Ça fait partie de moi.

David avec La Chanceuse, modèle amiral de chez Marceau Guitars, initialement réalisée pour Lucky Peterson.

SANS VOULOIR SORTIR LES CLICHETONS, LE BUT DU JE EST-IL UNE SORTE DE BILAN PRÉ-QUARANTAINE ?

C’est possible, mais tu sais, je ne suis pas trop sensible à l’âge et les bilans et les remises en question, ce sont des choses qui m’accompagnent depuis au moins une vingtaine d’années, ce qui explique d’ailleurs qu’on trouve dans mes morceaux une part de mélancolie et de tristesse que je n’exprime nulle part ailleurs. La musique a toujours représenté un parfait véhicule pour me vider de toutes ces émotions. Comme je dis souvent, je préfère je préfère évacuer les énergie négatives plutôt que de les laisser pourrir à l’intérieur de moi, et la musique est un parfait exutoire pour ça. Auparavant, j’avais fait plein d’autres chansons, des trucs plus acoustiques ou au contraire plus vénères, mais sans jamais parvenir à trouver cet équilibre ni à atteindre cet endroit où, une fois que tu y es, tu te dis : « Cette musique, ça résonne, ça me ressemble, c’est vraiment moi. »

COMBIEN DE TEMPS T’A-T-IL FALLU POUR ÉCRIRE LES CHANSONS ?

Deux ans, et pour moi qui suis habitué à une forme d’immédiateté très agréable avec YouTube, c’est super long. J’ai composé plein de chansons pour n’en conserver que six et je suis passé par plein de phases. Le plus difficile et le plus excitant, c’était de trouver ma propre manière de faire sonner le français sur ce genre de musique.

TU AS COLLABORÉ AVEC DES GENS DE TA GARDE RAPPROCHÉE SUR LES MUSIQUES ET LES TEXTES…

Bien sûr ! Il y a déjà Martin Bonami, qui fait le son de mes vidéos, qui était guitariste et chanteur dans mon ancien groupe et qui est surtout un grand ami. On compose souvent de la musique ensemble, et puis c’est aussi l’autre guitariste qui m’accompagnera sur scène. Pour les textes, j’ai travaillé avec Guillaume (Balzak). Il m’a été d’une aide précieuse pour prendre du recul sur ce que j’écrivais et aussi pour mettre en forme mes idées. Il m’a aidé à me débloquer, parce que l’écriture est pour moi une thérapie qui est toujours en cours.

TU AS CHOISI DE NE PAS UTILISER TON PSEUDO MCFLY, MAIS SIMPLEMENT TON PRÉNOM. N’EST-CE PAS UN PEU RISQUÉ ?

Si, peut-être. Il y a quatre mois, je ne savais pas encore quels seraient précisément les contours de ce projet, et j’ai pris la décision de l’appeler DaviD le dernier jour du mixage. En réécoutant les titres, j’ai compris que ces chansons parlaient de mon moi intime et pas de McFly, qui est finalement une autre facette de ma personnalité qui n’a rien à voir avec celle que je dévoile dans ce disque.

La Morceau DaviD signature et sa finition minérale qui griffe la rétine.

C’EST UN PEU LE SAUT DANS L’INCONNU. PENSES-TU QUE LE PUBLIC DE MCFLY & CARLITO VA TE SUIVRE DANS CETTE NOUVELLE AVENTURE ?

Je pense que les gens qui nous suivent sur YouTube nous aiment parce que nous sommes libres et authentiques, et l’expérience de l’album que nous avons sorti avec Carlito nous a montré qu’on peut les embarquer dans à peu près n’importe quelle contrée, à partir du moment où nous faisons les choses avec honnêteté. Pour l’instant, je suis agréablement surpris par l’engouement des gens, même ceux qui n’écoutent pas du tout de rock et de metal. J’espère d’ailleurs pouvoir oeuvrer pour la bonne cause à mon petit niveau en amenant le grand public à écouter du rock, parce qu’en France, c’est un peu la désolation à ce niveau-là.

JE M’ATTENDAIS À CE QU’IL AIT PLUS DE SOLOS. IL Y EN A DEUX OU TROIS, ET ILS SONT PLUTÔT CONCIS…

Je me suis posé beaucoup de questions, mais souvent, quand je travaillais les chansons, je me disais qu’elles se suffisaient à elles-mêmes et n’avaient pas besoin de solo. Ça aurait été naze de rajouter des parties juste pour prouver que je suis capable de le faire. C’est vrai qu’ils sont courts, mais rassurez-vous, en concert, nous n’allons pas nous priver d’étirer et de développer ces moments-là.

« La Marceau DaviD signature est ultra-résonante et précise, mais pue juste un peu des pieds comme j’aime. »

LA PERSPECTIVE D’ÊTRE SUR LE DEVANT DE LA SCÈNE AVEC TON MICRO ET TA GUITARE T’EFFRAIE-T-ELLE ?

Au contraire, c’est ma partie favorite. Lors de la tournée avec Carlito, je me suis rendu compte que c’est ce que j’avais envie de faire et qui me faisait vibrer. Créer de la musique est ce qu’il y a de plus important, mais l’envie de faire de la scène, c’est quasiment ex aequo.

IL Y A PAS MAL DE TRAITEMENTS ET DE TEXTURES SUR LES GUITARES. ES-TU DU GENRE À AVOIR UN BOARD D’UN MÈTRE CINQUANTE DE LONG ?

Non, je ne suis pas du tout ce mec-là. À la base, moi, j’aime une Telecaster branchée directement dans un ampli. En studio, je voulais préserver ce côté organique, qu’on entende vraiment des doigts bouger sur des cordes, qu’il y ait du feedback et qu’on sente vibrer les membranes des HP. Par contre, je ne suis pas opposé à apporter des effets lorsque je sens que j’en ai besoin, et Martin m’a pas mal épaulé à ce niveau-là.

En gros plan, c'est encore plus beau !!!

QUELS AMPLIS AVEZ-VOUS UTILISÉS ?

Je ne me souviens plus précisément des noms des modèles, mais c’étaient un Bogner et un Peavey, que nous avons empruntés chez ICP à Bruxelles. Nous les avons mélangés en repiquant les enceintes avec des micros dynamiques et des micros à ruban, et on a adapté le dosage au mix en fonction de ce qu’on voulait pour chacune des chansons. De cette façon, nous avons trouvé ce compromis entre un son carré et maîtrisé et quelque chose de plus vivant qui déborde un peu avec du grain. C’est aussi pour cette raison qu’on jouait souvent ensemble, Martin et moi. Il est très précis et moi plutôt freestyle. Nous avons une bonne alchimie naturelle. Lui jouait la plupart du temps avec une Marceau Dominante type Les Paul et moi avec une Élégante type Tele.

VU TA NOTORIÉTÉ, TU AURAIS PU CONTACTER FENDER OU PRS. POURQUOI T’ÊTRE TOURNÉ VERS UNE MARQUE FRANÇAISE ?

Concrètement, si je veux une guitare d’une grosse marque, je peux me la payer. Pour moi, l’intérêt, c’était d’aller discuter avec quelqu’un et de travailler avec lui en profondeur sur le son que je recherchais. PV Nova m’a parlé de Tom. Je l’ai appelé et suis allé chez lui à Betton, en Bretagne, pour essayer ses guitares. J’ai trop kiffé. Ce sont des guitares qui tuent et qui sont faites en France avec le coeur et la passion. Il a eu plein d’idées et notre boulot va parfaitement dans le sens de mon projet, ce qui serait moins le cas avec une marque « corporate ».

PARLONS DE CETTE GUITARE, LA DAVID SIGNATURE, QUI SERA ANNONCÉE À PEU PRÈS LORSQUE CE NUMÉRO PARAÎTRA…

Dès le départ, j’avais dans l’idée de me faire un modèle à moi, quelque chose de spécial, histoire de me faire kiffer jusqu’au bout. Quand j’en ai parlé à Tom, il était trop chaud, alors on a dit « banco ». On s’est enfermés pendant plusieurs jours pour jeter sur la table toutes sortes d’idées, parfois pas vraiment raisonnables. Je voulais cette forme un peu Telecaster, mais un peu plus affûtée, un profil de manche plutôt typé Gibson avec une tête 3×3 façon PRS, des chanfreins de confort et des finitions vraiment spéciales qu’on ne trouve pas dans le commerce, dont l’une, très minérale et aléatoire, est réellement spectaculaire. Les micros, des single-coils, sont bobinés par ses soins. Le résultat est fou et c’est juste la guitare de mes rêves. La Marceau DaviD signature est ultra-résonante et précise, mais pue juste un peu des pieds comme j’aime.

MERCI POUR CETTE INTERVIEW, DAVID, C’ÉTAIT UN TRÈS BON MOMENT, MÊME SI JE PENSE QU’ON VA SE FAIRE BIEN BASHER…

Les gens qui parlent et qui répandent leur fiel, j’ai l’habitude (rires). Je ne suis pas le meilleur guitariste et je prends peut-être un peu de place à des guitaristes qui mériteraient plus que moi d’apparaître dans Guitare Xtreme, mais j’ai la chance d’avoir un peu de notoriété et je suis aussi là pour défendre cette musique et faire du bien aux copains. On n’est pas si nombreux en France à faire du rock et du metal, alors c’est plus constructif de se tenir la main plutôt que de se tirer dans les pattes. Je vous aime ! •

Ludovic Egraz

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